SAINTE-HÉLÈNE
LA LÉGENDE NAPOLÉONIENNE

Avec Sainte-Hélène, Les Lunaisiens ouvrent une page de l’Histoire en chansons. Le 5 mai 1821, Napoléon Bonaparte trépasse. C’est la fin de l’extraordinaire épopée d’un petit caporal qui deviendra empereur des Français. Idolâtré, détesté, peu importe : il est omniprésent et particulièrement dans l’univers de la chanson. Plusieurs milliers de couplets seront écrits du vivant de napoléon, puis d’autres encore jusqu’au début du XXème siècle. On chantera sa redingote grise et son petit chapeau, on appréciera ses victoires et l’on conspuera ses défaites.
Nombre de chansonniers furent de fervents défenseurs de l’empereur, continuant de sanctifier son image dans des caveaux secrets sous la Restauration – alors que l’on sanctionne ceux qui chantent des refrains comme Les Souvenirs du Peuple et Sainte-Hélène de Béranger ou le fameux Te Souviens-tu d’Émile Debraux. D’autres, anonymes, s’adonnèrent à une propagande en musique avec La Machine Infernale ou Les Français au Général Bonaparte ; d’autres encore critiquèrent l’empire avec des refrains royalistes tels que : Les Mérites de Bonaparte ou La Campagne de Russie. Bref, comme toujours, la chanson, en France, est une arme efficace pour faire de la politique.
Dans ce disque, Les Lunaisiens sont accompagnés par des instruments historiques joués par Les Cuivres Romantiques. Ces derniers ont soufflé dans des trompettes, cors et buccins d’époque, prêtés pour l’occasion par le Musée de la musique de la Philharmonie de Paris. Ainsi pouvons-nous entendre des pièces originales de Buhl, Cherubini et autres qui furent jouées par la fanfare de la garde consulaire puis impériale ou par d’autres musiques régimentaires. À leurs côtés, le trio d’hommes incarne les compagnons de Napoléon. Descendants du colonel Chabert de Balzac, ils sont prêts à tout pour que la Légende de Sainte-Hélène perdure.
Mais l’univers musical napoléonien ne s’illustre pas qu’au front. La vie des simples et des bourgeois a profondément été marquée par le règne de Bonaparte. Cet album permet de mettre en lumière deux autres pans de la musique au temps de l’empereur: la rue et ses chansons populaires, et le salon, avec la romance.
Cette romance, qu’interprète Sabine Devieilhe, accompagnée par Daniel Isoir au piano – historique également –, n’est pas sans évoquer l’univers de l’imagerie d’Épinal : Le Tombeau de Joséphine ou les Adieux d’une Mère (écrite par la Reine Hortense), sont les témoignages d’un art de l’élégance et du raffinement tout français qui participent largement à la sacralisation de la figure de napoléon.
Au dehors, serpent et orgue de barbarie secondent le chanteur populaire, le harangueur des rues, qui tantôt se met dans le rang des grognards, tantôt dans celui des conspirateurs.
Nous espérons que l’auditeur se fera happer par toutes ces musiques qui furent populaires et qui nous questionnent sur la grandeur d’un homme complexe. Napoléon, dans son dernier exil écrivit : « Si je fusse mort sur le trône, dans les nuages de la toute-puissance, je serais demeuré un problème pour bien des gens ; aujourd’hui, grâce au malheur, chaque heure me dépouille de ma peau de tyran...».
Arnaud Marzorati
Les Lunaisiens
Arnaud Marzorati, dir. artistique, baryton
Sabine Devieilhe, soprano
David Ghilardi, ténor
Igor Bouin, baryton
Geoffroy Buffière, basse
Daniel Isoir, pianoforte
Patrick Wibart, serpent
Laurent Madeuf, orgue de barbarie
&
Les Cuivres Romantiques
sur les instruments du Musée de la musique - Philharmonie de Paris